L’ordonnance du 15 décembre 2021 apporte des modifications importantes en matière de créations logicielles et d’inventions réalisées par des stagiaires.

Avant l’ordonnance

En principe, le Code de la propriété intellectuelle reconnaît :

  • la qualité d’auteur à celui qui crée une oeuvre (comme un logiciel) ;
  • la qualité d’inventeur à celui qui crée une invention.

Evidemment, cette présentation est simpliste et il existe en réalité de nombreuses exceptions prévues par la loi.

Les principales concernent tout d’abord les logiciels créés par des salariés, qui appartiennent à l’employeur :

Sauf dispositions statutaires ou stipulations contraires, les droits patrimoniaux sur les logiciels et leur documentation créés par un ou plusieurs employés dans l’exercice de leurs fonctions ou d’après les instructions de leur employeur sont dévolus à l’employeur qui est seul habilité à les exercer. (…)

Article L. 113-9 du Code de la propriété intellectuelle

Sont également concernés les salariés à l’origine d’inventions :

(…) Les inventions faites par le salarié dans l’exécution soit d’un contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, soit d’études et de recherches qui lui sont explicitement confiées, appartiennent à l’employeur. (…)

Article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle

Ces articles du Code de la propriété intellectuelle n’évoquent que la situation des « employés » ou des « salariés ».

De nombreux employeurs (privés comme publics) se sont interrogés pour savoir si cela s’appliquait aussi à leurs autres collaborateurs : stagiaires, doctorants, etc. La réponse est négative.

Le Conseil d’Etat a notamment été amené à se prononcer sur la question des inventions brevetables créées par des étudiants en stage au CNRS :

Considérant qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que la propriété des inventions faites par les étudiants non rémunérés, qui ont la qualité d’usagers du service public, ne saurait être déterminée en application des dispositions de l’article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle, lesquelles sont applicables aux seuls salariés et agents publics ; qu’elle relève donc de la règle posée par l’article L. 611-6 du même code attribuant cette propriété à l’inventeur ou à son ayant cause ;

Conseil d’Etat, 22 février 2010

Après l’ordonnance

L’ordonnance du 15 décembre 2021 vient modifier cette situation.

Elle ajoute dans le Code de la propriété intellectuelle des dispositions spécifiques pour les créateurs de logiciels qui ne sont pas employés :

Sauf stipulations contraires, lorsque des personnes qui ne relèvent pas de l’article L. 113-9 et qui sont accueillies dans le cadre d’une convention par une personne morale de droit privé ou de droit public réalisant de la recherche créent des logiciels dans l’exercice de leurs missions ou d’après les instructions de la structure d’accueil, leurs droits patrimoniaux sur ces logiciels et leur documentation sont dévolus à cette structure d’accueil, seule habilitée à les exercer, si elles se trouvent à l’égard de cette structure dans une situation où elles perçoivent une contrepartie et où elles sont placées sous l’autorité d’un responsable de ladite structure.

Article L. 113-9-1 du Code de la propriété intellectuelle

Ainsi que pour les inventeurs qui ne sont pas salariés :

Lorsque l’inventeur est une personne physique qui ne relève pas de l’article L. 611-7 et qui est accueillie dans le cadre d’une convention par une personne morale de droit public ou de droit privé réalisant de la recherche, le droit au titre de propriété industrielle portant sur l’invention réalisée par cet inventeur est, à défaut de stipulation plus favorable à ce dernier, défini selon les dispositions ci-après (…)

Article L. 611-7-1 du Code de la propriété intellectuelle

Selon le rapport au président de la république, ces dispositions ont vocation à bénéficier aux stagiaires, doctorants étrangers et professeurs ou directeurs émérites.

Toutefois, l’application de ces dispositions au bénéfice de l’employeur n’est pas automatique mais soumise à différentes conditions cumulatives.

En outre, les autres créations que peuvent réaliser stagiaires et doctorants ne sont pas concernées.

Réflexes à avoir :

Il est donc recommandé :

  • d’auditer les conventions conclues avec les stagiaires, doctorants, etc. pour vérifier si l’employeur peut revendiquer la titularité des droits sur les logiciels ou inventions créés par eux,
  • de compléter ces conventions par des clauses de cessions de droits de propriété intellectuelle dans les cas où l’ordonnance du 15 décembre 2021 ne s’appliquera pas ainsi que pour les autres créations réalisées par les stagiaires, doctorants, etc.

Photo : Unsplash License – Kvalifik https://unsplash.com/photos/5Q07sS54D0Q 

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Gaëtan Bourdais, Avocat

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