Dans deux arrêts du 13 octobre 2021 (1) (2), la Cour de cassation change de position sur la question de savoir si l’acte de déposer une marque peut être constitutif de contrefaçon d’une marque antérieure.

Auparavant, la Cour de cassation jugeait qu’il était loisible au titulaire d’une marque antérieure de poursuivre un tiers pour avoir simplement déposé une marque identique ou similaire à la sienne. Le seul dépôt de la demande de marque devant l’INPI était sanctionnable, même en l’absence d’exploitation réelle de la marque pour des produits ou services.

Cette position contrastait toutefois avec la jurisprudence européenne en matière de droit des marques.

En effet, du côté des juges de Luxembourg, le titulaire d’une marque peut interdire à un tiers d’utiliser un signe similaire à sa marque, sous réserve de respecter plusieurs conditions, dont celle de réaliser un usage dans la vie des affaires.

Or, il apparaissait de plus en plus douteux que le dépôt d’une demande d’enregistrement de marque auprès de l’INPI constituait un tel usage dans la vie des affaires.

De nombreux tribunaux et cours d’appel considéraient que tel n’était pas le cas.

Avec ces deux arrêts, la Cour de cassation vient aligner sa jurisprudence avec celle des juges européens.

C’est ainsi sans détour qu’elle juge, à présent :

La Cour de cassation a précédemment interprété (…) que le dépôt à titre de marque d’un signe contrefaisant constitue à lui seul un acte de contrefaçon, indépendamment de son exploitation (…)

Il y a toutefois lieu de reconsidérer cette interprétation à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

(…) la demande d’enregistrement d’un signe en tant que marque, même lorsqu’elle est accueillie, ne caractérise pas un usage pour des produits ou des services, au sens de la jurisprudence de la CJUE, en l’absence de tout début de commercialisation de produits ou services sous le signe. De même, en pareil cas, aucun risque de confusion dans l’esprit du public et, par conséquent, aucune atteinte à la fonction essentielle d’indication d’origine de la marque, ne sont susceptibles de se produire.

Dès lors, la demande d’enregistrement d’un signe en tant que marque ne constitue pas un acte de contrefaçon.

Arrêts n°19-20.959 et n°19-20.504

Cette position est la bienvenue et permettra de trancher définitivement cette question devant les tribunaux.

Photo : Unsplash License – Tingey Injury Law Firm  https://unsplash.com/photos/yCdPU73kGSc

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Gaëtan Bourdais, Avocat

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